Carte Blanche – Sacrifier les jeunes ne sauvera pas le budget de la Fédération Wallonie-Bruxelles
25.04.2025
La Fédération Wallonie-Bruxelles s'apprête à faire payer sa mauvaise gestion à celles et ceux qui ont le moins de poids politique : les jeunes. Un trou budgétaire est mis au jour, et déjà, les premières cibles sont désignées. Le gouvernement MR-Engagés vient apparemment de découvrir un trou budgétaire de 336 millions dans ses caisses.
La Fédération Wallonie-Bruxelles s’apprête à faire payer sa mauvaise gestion à celles et ceux qui ont le moins de poids politique : les jeunes. Un trou budgétaire est mis au jour, et déjà, les premières cibles sont désignées. Le gouvernement MR-Engagés vient apparemment de découvrir un trou budgétaire de 336 millions dans ses caisses. On nous promet déjà des décisions difficiles dont « aucun secteur ne sera épargné ». La plus grande partie du budget de la Fédération sert pourtant à financer des services à destination des jeunes francophones : l’école puis l’enseignement supérieur bien-sûr mais aussi, les crèches le sport, les maisons de jeunes, la culture ou encore les bourses d’études. Nul doute que la pilule sera dure à avaler d’une part pour les acteurs du secteur mais aussi pour les francophones qui comptent sur les services financés par la Fédération Wallonie-Bruxelles, peut-être même plus que ceux des autres niveaux de pouvoirs.
Le Gouvernement MR-Engagés avait déjà donné un coup d’essai en supprimant les 7e techniques de qualification, en définançant l’enseignement officiel, en diminuant l’investissement prévu dans la rénovation et l’isolation des bâtiments scolaires, et en organisant une coupe budgétaire dans les établissements d’enseignement supérieur de 6,5 Millions d’euros. Mais elle s’apprête à l’issue de son conclave budgétaire à passer d’une politique d’économie à une politique d’austérité pure et dure. Les premières fuites dans la presse parlent d’augmenter le minerval de certains étudiants, de couper dans les budgets « Jeunesse », ou encore de renoncer à l’augmentation salariale des enseignants maintenant formés en 4 ans au lieu de 3. Le choix de cette politique d’austérité poussera par ailleurs la majorité à renoncer aux mesures qui étaient pourtant dans l’accord de gouvernement et attendus par la population. Par exemple les étudiantes se mobilisent depuis des années pour demander des moyens pour créer des centres d’accueil des victimes de violences sexistes et sexuelles sur les campus, elles devront patienter apparemment encore au moins 5 ans. De même les jeunes demandaient un réel investissement de lutte contre la précarité étudiante alors que cette même précarité tend à allonger les temps d’études et coûte donc in fine… à tous.
Pour qu’une politique impopulaire soit acceptée par la population, il faut qu’elle réunisse certaines conditions : qu’elle soit nécessaire, qu’elle soit juste et qu’elle soit démocratiquement légitime. Or cette nouvelle orientation budgétaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles ne réunit aucune des 3 conditions.
Premièrement, des économies d’une telle ampleur ne semblent pas nécessaires puisque la majeure partie de ce trou correspond à des écritures comptables européennes (la fameuse comptabilité SEC), et non à des réelles dépenses. Par exemple, 112 des 336 millions évoqués correspondent à des rénovations que les universités ont effectuées avec leur propre compte épargne, parfois même sans intervention financière de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Deuxièmement, il faut que la décision soit juste. Or les coupes budgétaires à venir vont impacter en premier lieu les publics les plus précaires et les plus fragiles. Celles et ceux qui ont le plus besoin de crèches, de maisons de jeunes, de SAJ, de services d’accrochage scolaire, d’une école moins chère ou de bourses. En parallèle, on voit que le politique arrive à trouver des moyens financiers importants qui auraient permis de pouvoir renoncer à ces économies. La Région wallonne et la Fédération Wallonie-Bruxelles ont ainsi décidé une trajectoire budgétaire commune engendrant que les économies faites par une entité pouvaient servir à alléger celles d’une autre. Or depuis l’arrivée du gouvernement MR-Engagé, la réduction très significative des droits d’enregistrement coûtera 250 millions en 2025 et 480 millions au total, et celle des droits de succession 350 millions par an.
L’austérité qui va être décidée sur la jeunesse aurait donc être pu aisément évitée si les gouvernements MR-Engagés ne s’étaient pas privés de ces précieuses rentrées budgétaires, qui affectaient particulièrement des ménages plus âgés et aisés.
Troisièmement, il faut que ces politiques reposent sur une forte légitimité démocratique. Si personne ne remet en doute le résultat des élections du 9 juin dernier, les électeurs ne se sont pas prononcés en faveur de ces économies, tout du moins, ceux qui ont voté pour Les Engagés, parti de la Ministre-Présidente. Le programme du parti turquoise prônait même à l’inverse une politique de réinvestissement dans les matières de la Fédération Wallonie-Bruxelles : droit à une crèche pour chaque enfant, poursuite de la gratuité de l’enseignement, refinancement public de l’enseignement supérieur et sortie de l’enveloppe fermée, réinvestissement dans les bourses d’études faisaient partie de leurs projets-phares.
Dès lors que ce tournant austéritaire n’est ni nécessaire, ni juste, ni légitime, il ne sera pas accepté par la jeunesse qui comprendra que la majorité est en train de la sacrifier. Or, aucune société ne se relève en sacrifiant sa jeunesse. Aucune politique de rigueur ne peut être juste si elle frappe d’abord les plus fragiles. Ils ont besoin de mandataires politiques qui mènent des réformes ambitieuses. On a beaucoup entendu le MR et Les Engagés se vanter de prendre leurs responsabilités. Or quand 23 % des jeunes de 18 à 29 ans présentent des signes d’anxiété et 18 % des signes de dépression selon Sciensano, la politique responsable est celle qui s’adressera à la détresse des jeunes, pas celle qui s’attaquera à leur quotidien.
Les jeunes ne sont pas un coût. Ils sont un investissement. Et les abandonner, c’est hypothéquer notre avenir collectif. Si Elisabeth Degryse s’entête à faire entrer la Fédération Wallonie-Bruxelles dans une politique d’austérité pure et dure, elle brisera le lien entre les jeunes et l’État.